(c) Caslot Jean Charles / BRAGELONNE |
Vous avez été nombreux à vous intéresser à la première partie de l'interview de Stéphane Marsan. Aujourd'hui, j'ai le plaisir de vous dévoiler la
suite et la fin de cette interview.
Un grand merci à Stéphane et aux éditions Bragelonne d'avoir accepter de répondre à mes questions.
Quel roman Bragelonne/Milady est ton coup de cœur 2012 ?
Il y en a tant !!! Le prince écorché, de Mark Lawrence, sans doute, à cause de sa puissance, de cette voix inouïe entre élégance et hargne, et parce que la Fantasy reste mon chouchou à moi.
Que nous prépares-tu pour 2013 ?
Plein de choses extraordinaires !!! A commencer par le premier roman d'un jeune auteur français, Antoine Rouaud : La voie de la colère, 1er tome de son cycle Le livre et l'épée. Epoustouflant d'intelligence et d'émotion, je l'ai découvert tout juste avant la foire de Francfort en octobre l'an dernier et il a enthousiasmé des éditeurs du monde entier. Il paraitra en 6 langues en octobre 2013... mais en français au printemps. J'ai été stupéfié par le talent de ce garçon et ravi de voir que tous ceux qui ont lu le manuscrit après moi m'ont confirmé que c'était le meilleur roman de Fantasy français qu'ils avaient lu depuis des années. On en reparlera...
Pour toi, que représente actuellement le numérique en France ? Un marché émergeant ? Un moyen de promotion ?
Majesté, c'est une révolution ! :) C'est bien sûr un marché en plein développement qui ne représente encore qu’une part minuscule du marché du livre en France mais dans lequel Bragelonne a voulu s’impliquer très tôt avec les excellents résultats que l'on sait. C'est une façon d'acheter et de lire des romans qui vient compléter la forme traditionnelle du papier. En France on ne voit que les prémices de ce qui est en train de se passer : quand on regarde ce qui se passe aux USA, ça donne le vertige. J’y ai fait plusieurs séjours ces deux dernières années et j’ai pu constater au fur et à mesure l’amplification du bouleversement là-bas. C’est à l’été 2010 à New York que je me suis rendu compte de l’ampleur du séisme : la façon dont la crise économique et en particulier la faillite d’une grande partie de la distribution du livre papier favorisaient presque automatiquement le développement du livre numérique. Ce n’est pas la technologie elle-même qui a suscité le développement du livre numérique. Ça décolle à partir du moment où on peut la vendre et où elle répond à un besoin, or c’est très exactement ce qui s’est passé aux USA. Le livre numérique n’est pas responsable de l’affaiblissement des ventes de livres papier, mon sentiment est que c’est justement l’inverse.
Le contexte français, pour de nombreuses raisons, ne suscite pas le même phénomène. D’une part à cause de résistances culturelles et légales typiques de notre pays, raisons pour lesquelles la stratégie de conquête et de démocratisation par le kindle d’Amazon, par exemple, n’a pas pu s’effectuer ; et d’autre part nous n’avons pas subi la même crise et n’avons donc pas eu besoin que le livre numérique commence à compenser la disparition pure et simple du livre papier d’une grande partie de notre territoire, comme ce fut le cas aux USA. En France, même si la librairie va mal, la disponibilité du livre papier n’a pas été endommagée chez nous à tel point que le téléchargement devienne souvent la seule façon de se procurer de la lecture, renforcé par l’avantage d’être peu cher et instantané. Ici l’industrie du livre n'en est pas encore à dire "le numérique ou la mort" mais pour le moins, nous avons compris très tôt que si on ne s'y mettait pas, non seulement on se privait de perspectives intéressantes dans les pratiques de lecture, d’achat, de collection, de curiosité, de découverte, de partage… mais en plus on pouvait s'attendre à des lendemains difficiles.
Il faut quand même prendre la mesure du désastre et envisager un avenir sans librairies. Je suis étonné de voir qu’on n’en parle nulle part. Enfin, « étonné »… c’est la France, hein. C’est l’autruche qui devrait être notre emblème, pas le coq. L’idée que les libraires disparaissent comme les disquaires ont disparu est terrifiante, or c'est une probabilité très sérieuse et pire encore, croissante. Depuis deux ou trois ans les plus grands groupes de presse du monde se préparent à ne plus sortir un seul magazine imprimé à un horizon de dix ans. Le livre n’en est pas là mais encore une fois, en France comme ailleurs, il faut voir les choses en face. Non seulement la librairie va mal, mais en plus le numérique apporte des solutions à certains des problèmes qu’on rencontre avec la diffusion livres, le fonds, les retours, la faible représentation des genres mineurs, la persistance commerciale du patrimoine… Du coup, nous devons à la fois nous battre avec la dernière énergie contre cette menace en soutenant la librairie, et développer le numérique pour profiter de ce qu’il apporte d’utile et de profitable à tous. C’est pas simple, mais c’est surement pas en se voilant la face qu’on y arrivera.
Sincèrement, la France du livre semble souvent coincée au XIXe siècle. Comme dans ces films d’actu en noir et blanc avec des messieurs en redingote noire et chapeau haut-de-forme se serrant la main sur les perrons des palais de la république : « monsieur le président du conseil a reçu son homologue blabla abordé les questions blabla fructueux débat… » Pendant ce temps, Amazon, Apple, Google et consorts bougent les pions sur l’échiquier, et les pions c’est les œuvres, les auteurs, les éditeurs, les libraires, les bibliothécaires… et ceux qu’ils ne bougent pas, ils sont capables de les détruire. Pour réagir il faut commencer par comprendre tout ça, se rendre compte de leur pouvoir et de l’archaïsme de nos défenses, parce que leur réalité est à des années-lumière de notre vision du monde. Pour eux, notre pratique de la vente de livres ressemble à un concert de musique de chambre comparé au MP3 que tu télécharges en pleine rue. L’exception française, soit ça les fait chier, soit ça les fait rire. Et comme notre marché du livre n’est pas brillant, on ne peut pas se reposer sur notre système.
Tout ça pour te dire que le numérique c’est à la fois des opportunités géniales et une guerre dans laquelle on a intérêt à ne pas se refaire le coup de la ligne Maginot.
Dès lors l’enjeu, pour Bragelonne, dont la vitalité voire l’insolence sont des conditions d’indépendance et de survie, fut tout de suite de prendre le train en marche, mieux : de sauter dans la loco, à savoir développer le numérique sans attendre, et de le faire à notre façon, c’est-à-dire comme souvent chez Brag à la McGyver, avec un chewing-gum et un briquet, en imaginant quelle vision éditoriale devait s’adapter à ce nouveau mode de diffusion et de vente, et en mettant en place un système pragmatique, rationnel, soucieux du droit d’auteur et des logiques de rémunération, de contractualisation, etc. Un sacré chantier !
Donc le numérique, ça permet de faire des promotions sympa, en effet, mais c’est déjà beaucoup plus que ça. Depuis deux ans qu’on a lancé l’offre numérique de Bragelonne je crois qu’on a réussi un truc assez bluffant. On apporte aux auteurs un revenu complémentaire substantiel. On a fait évoluer des postes. On recrute des lecteurs. On augmente la notoriété des genres de l’imaginaire. On met à disposition des ouvrages que la librairie tradi ne veut ou ne peut pas proposer. On construit une relation éditeur-diffuseur-libraire entièrement nouvelle de façon à faire en sorte que la lecture reste un loisir crucial dans l’avenir.
Et surtout, je crois que ces deux marchés, le livre papier et le livre électronique, ne s'opposent pas. Ils se répliquent, se complètent, se renforcent. Nous ne sommes qu’au tout début de ce qu’on va inventer et consolider avec le numérique.
En avril 2012, vous avez lancé l'opération 100k pour fêter votre 100 000ème livre numérique vendu. Ce week-end, vous avez récidivé l'opération pour fêter les 200 00 exemplaires vendus. Comment expliques-tu une telle progression en 5 mois ? Penses-tu que les Français sont de moins en moins réfractaires aux e-books ?
Incontestablement. Surtout les catégories de la population les moins technophiles, comme les personnes « d’un certain âge » par exemple, qui apprécient la légèreté de la liseuse et le confort de lecture en gros caractères (count me in !).
Ceci dit, la raison essentielle tient aux efforts et à l'énergie des acteurs de cette progression. Le numérique est un métier de l’édition à part entière : la fabrication, le marketing, les droits, tout ça est à concevoir et réaliser autrement. Le diffuseur numérique e-Dantès, le distributeur Immatériel et tous les libraires numériques, en particulier les indépendants, sont en train de construire ce marché avec nous, ils déploient une inventivité et un enthousiasme très excitants et rafraîchissants Parce que nous voulons que le livre numérique reste dans les mains des gens dont c’est le métier d’acheminer, de vendre et de conseiller du livre : la diffusion, la librairie, la bibliothèque. La révolution numérique du livre, on veut la faire avec eux.
Enfin, on regarde évidemment les chiffres de vente, les opérations commerciales etc. mais mon expérience personnelle du numérique c’est de retrouver le contact avec une source inépuisable de bonheur, de savoir et d’émotions. J’ai toujours un immense plaisir à aller chez mes libraires de quartier et à prendre en main des œuvres de papier. Et à côté de ça, depuis que tu m’as demandé de répondre à cette interview j’ai téléchargé pêle-mêle Le grand Meaulnes et La montagne magique qui sont parmi mes romans préférés depuis toujours et que j’aurai désormais partout avec moi, une dizaine de jeunes auteurs francophones à découvrir, des livres sur l’écriture du scénario introuvables en France, quelques romans qu’on m’a recommandé lors de conversations et des dizaines de comics. La plupart de ces bouquins, je ne les aurais pas achetés en librairie, parce que je les aurais oubliés entretemps ou ils n’auraient pas été disponibles. En plus des ouvrages que je rencontre par hasard sur les tables, j’ai dorénavant la possibilité d’acquérir et de me fournir à distance instantanément avec un titre qui me traverse la tête n’importe quand. Les chiffres montrent que les lecteurs numériques se mettent à acheter plus de livres, tous formats confondus. En particulier dans l’imaginaire.
A chaque fois, et ça arrive souvent, que quelqu’un me dit qu’il a découvert une œuvre publiée par Bragelonne, Milady, Milady Graphics ou Castelmore en numérique qu’il n’avait jamais vue et dont il n’avait jamais entendu parler avant, je me dis, voilà ça sert à ça et c’est pour ça que je fais ce métier. On ne fait plus de l’édition comme au XIXe ni même comme dans les années 60. On ne la fait déjà plus aujourd’hui comme on la faisait il y a trois ans. Mais la mission est la même.
Merci Stéphane et à bientôt.
J'espère que vous avez apprécié cette interview.
Retrouvez, chaque mois, l'interview du mois sur les Mondes Imaginaires !
Un grand merci à Stéphane et aux éditions Bragelonne d'avoir accepter de répondre à mes questions.
Il y en a tant !!! Le prince écorché, de Mark Lawrence, sans doute, à cause de sa puissance, de cette voix inouïe entre élégance et hargne, et parce que la Fantasy reste mon chouchou à moi.
Que nous prépares-tu pour 2013 ?
Plein de choses extraordinaires !!! A commencer par le premier roman d'un jeune auteur français, Antoine Rouaud : La voie de la colère, 1er tome de son cycle Le livre et l'épée. Epoustouflant d'intelligence et d'émotion, je l'ai découvert tout juste avant la foire de Francfort en octobre l'an dernier et il a enthousiasmé des éditeurs du monde entier. Il paraitra en 6 langues en octobre 2013... mais en français au printemps. J'ai été stupéfié par le talent de ce garçon et ravi de voir que tous ceux qui ont lu le manuscrit après moi m'ont confirmé que c'était le meilleur roman de Fantasy français qu'ils avaient lu depuis des années. On en reparlera...
Pour toi, que représente actuellement le numérique en France ? Un marché émergeant ? Un moyen de promotion ?
Majesté, c'est une révolution ! :) C'est bien sûr un marché en plein développement qui ne représente encore qu’une part minuscule du marché du livre en France mais dans lequel Bragelonne a voulu s’impliquer très tôt avec les excellents résultats que l'on sait. C'est une façon d'acheter et de lire des romans qui vient compléter la forme traditionnelle du papier. En France on ne voit que les prémices de ce qui est en train de se passer : quand on regarde ce qui se passe aux USA, ça donne le vertige. J’y ai fait plusieurs séjours ces deux dernières années et j’ai pu constater au fur et à mesure l’amplification du bouleversement là-bas. C’est à l’été 2010 à New York que je me suis rendu compte de l’ampleur du séisme : la façon dont la crise économique et en particulier la faillite d’une grande partie de la distribution du livre papier favorisaient presque automatiquement le développement du livre numérique. Ce n’est pas la technologie elle-même qui a suscité le développement du livre numérique. Ça décolle à partir du moment où on peut la vendre et où elle répond à un besoin, or c’est très exactement ce qui s’est passé aux USA. Le livre numérique n’est pas responsable de l’affaiblissement des ventes de livres papier, mon sentiment est que c’est justement l’inverse.
Le contexte français, pour de nombreuses raisons, ne suscite pas le même phénomène. D’une part à cause de résistances culturelles et légales typiques de notre pays, raisons pour lesquelles la stratégie de conquête et de démocratisation par le kindle d’Amazon, par exemple, n’a pas pu s’effectuer ; et d’autre part nous n’avons pas subi la même crise et n’avons donc pas eu besoin que le livre numérique commence à compenser la disparition pure et simple du livre papier d’une grande partie de notre territoire, comme ce fut le cas aux USA. En France, même si la librairie va mal, la disponibilité du livre papier n’a pas été endommagée chez nous à tel point que le téléchargement devienne souvent la seule façon de se procurer de la lecture, renforcé par l’avantage d’être peu cher et instantané. Ici l’industrie du livre n'en est pas encore à dire "le numérique ou la mort" mais pour le moins, nous avons compris très tôt que si on ne s'y mettait pas, non seulement on se privait de perspectives intéressantes dans les pratiques de lecture, d’achat, de collection, de curiosité, de découverte, de partage… mais en plus on pouvait s'attendre à des lendemains difficiles.
Il faut quand même prendre la mesure du désastre et envisager un avenir sans librairies. Je suis étonné de voir qu’on n’en parle nulle part. Enfin, « étonné »… c’est la France, hein. C’est l’autruche qui devrait être notre emblème, pas le coq. L’idée que les libraires disparaissent comme les disquaires ont disparu est terrifiante, or c'est une probabilité très sérieuse et pire encore, croissante. Depuis deux ou trois ans les plus grands groupes de presse du monde se préparent à ne plus sortir un seul magazine imprimé à un horizon de dix ans. Le livre n’en est pas là mais encore une fois, en France comme ailleurs, il faut voir les choses en face. Non seulement la librairie va mal, mais en plus le numérique apporte des solutions à certains des problèmes qu’on rencontre avec la diffusion livres, le fonds, les retours, la faible représentation des genres mineurs, la persistance commerciale du patrimoine… Du coup, nous devons à la fois nous battre avec la dernière énergie contre cette menace en soutenant la librairie, et développer le numérique pour profiter de ce qu’il apporte d’utile et de profitable à tous. C’est pas simple, mais c’est surement pas en se voilant la face qu’on y arrivera.
Sincèrement, la France du livre semble souvent coincée au XIXe siècle. Comme dans ces films d’actu en noir et blanc avec des messieurs en redingote noire et chapeau haut-de-forme se serrant la main sur les perrons des palais de la république : « monsieur le président du conseil a reçu son homologue blabla abordé les questions blabla fructueux débat… » Pendant ce temps, Amazon, Apple, Google et consorts bougent les pions sur l’échiquier, et les pions c’est les œuvres, les auteurs, les éditeurs, les libraires, les bibliothécaires… et ceux qu’ils ne bougent pas, ils sont capables de les détruire. Pour réagir il faut commencer par comprendre tout ça, se rendre compte de leur pouvoir et de l’archaïsme de nos défenses, parce que leur réalité est à des années-lumière de notre vision du monde. Pour eux, notre pratique de la vente de livres ressemble à un concert de musique de chambre comparé au MP3 que tu télécharges en pleine rue. L’exception française, soit ça les fait chier, soit ça les fait rire. Et comme notre marché du livre n’est pas brillant, on ne peut pas se reposer sur notre système.
Tout ça pour te dire que le numérique c’est à la fois des opportunités géniales et une guerre dans laquelle on a intérêt à ne pas se refaire le coup de la ligne Maginot.
Dès lors l’enjeu, pour Bragelonne, dont la vitalité voire l’insolence sont des conditions d’indépendance et de survie, fut tout de suite de prendre le train en marche, mieux : de sauter dans la loco, à savoir développer le numérique sans attendre, et de le faire à notre façon, c’est-à-dire comme souvent chez Brag à la McGyver, avec un chewing-gum et un briquet, en imaginant quelle vision éditoriale devait s’adapter à ce nouveau mode de diffusion et de vente, et en mettant en place un système pragmatique, rationnel, soucieux du droit d’auteur et des logiques de rémunération, de contractualisation, etc. Un sacré chantier !
Donc le numérique, ça permet de faire des promotions sympa, en effet, mais c’est déjà beaucoup plus que ça. Depuis deux ans qu’on a lancé l’offre numérique de Bragelonne je crois qu’on a réussi un truc assez bluffant. On apporte aux auteurs un revenu complémentaire substantiel. On a fait évoluer des postes. On recrute des lecteurs. On augmente la notoriété des genres de l’imaginaire. On met à disposition des ouvrages que la librairie tradi ne veut ou ne peut pas proposer. On construit une relation éditeur-diffuseur-libraire entièrement nouvelle de façon à faire en sorte que la lecture reste un loisir crucial dans l’avenir.
Et surtout, je crois que ces deux marchés, le livre papier et le livre électronique, ne s'opposent pas. Ils se répliquent, se complètent, se renforcent. Nous ne sommes qu’au tout début de ce qu’on va inventer et consolider avec le numérique.
En avril 2012, vous avez lancé l'opération 100k pour fêter votre 100 000ème livre numérique vendu. Ce week-end, vous avez récidivé l'opération pour fêter les 200 00 exemplaires vendus. Comment expliques-tu une telle progression en 5 mois ? Penses-tu que les Français sont de moins en moins réfractaires aux e-books ?
Incontestablement. Surtout les catégories de la population les moins technophiles, comme les personnes « d’un certain âge » par exemple, qui apprécient la légèreté de la liseuse et le confort de lecture en gros caractères (count me in !).
Ceci dit, la raison essentielle tient aux efforts et à l'énergie des acteurs de cette progression. Le numérique est un métier de l’édition à part entière : la fabrication, le marketing, les droits, tout ça est à concevoir et réaliser autrement. Le diffuseur numérique e-Dantès, le distributeur Immatériel et tous les libraires numériques, en particulier les indépendants, sont en train de construire ce marché avec nous, ils déploient une inventivité et un enthousiasme très excitants et rafraîchissants Parce que nous voulons que le livre numérique reste dans les mains des gens dont c’est le métier d’acheminer, de vendre et de conseiller du livre : la diffusion, la librairie, la bibliothèque. La révolution numérique du livre, on veut la faire avec eux.
Enfin, on regarde évidemment les chiffres de vente, les opérations commerciales etc. mais mon expérience personnelle du numérique c’est de retrouver le contact avec une source inépuisable de bonheur, de savoir et d’émotions. J’ai toujours un immense plaisir à aller chez mes libraires de quartier et à prendre en main des œuvres de papier. Et à côté de ça, depuis que tu m’as demandé de répondre à cette interview j’ai téléchargé pêle-mêle Le grand Meaulnes et La montagne magique qui sont parmi mes romans préférés depuis toujours et que j’aurai désormais partout avec moi, une dizaine de jeunes auteurs francophones à découvrir, des livres sur l’écriture du scénario introuvables en France, quelques romans qu’on m’a recommandé lors de conversations et des dizaines de comics. La plupart de ces bouquins, je ne les aurais pas achetés en librairie, parce que je les aurais oubliés entretemps ou ils n’auraient pas été disponibles. En plus des ouvrages que je rencontre par hasard sur les tables, j’ai dorénavant la possibilité d’acquérir et de me fournir à distance instantanément avec un titre qui me traverse la tête n’importe quand. Les chiffres montrent que les lecteurs numériques se mettent à acheter plus de livres, tous formats confondus. En particulier dans l’imaginaire.
A chaque fois, et ça arrive souvent, que quelqu’un me dit qu’il a découvert une œuvre publiée par Bragelonne, Milady, Milady Graphics ou Castelmore en numérique qu’il n’avait jamais vue et dont il n’avait jamais entendu parler avant, je me dis, voilà ça sert à ça et c’est pour ça que je fais ce métier. On ne fait plus de l’édition comme au XIXe ni même comme dans les années 60. On ne la fait déjà plus aujourd’hui comme on la faisait il y a trois ans. Mais la mission est la même.
Merci Stéphane et à bientôt.
J'espère que vous avez apprécié cette interview.
Retrouvez, chaque mois, l'interview du mois sur les Mondes Imaginaires !
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